vendredi 31 octobre 2008

Nuit noire sur la 117 …



Lentement, l'homme souleva le drap. Un léger sourire étira ses lèvres lorsqu'il vit l'effroi dans les yeux des trois adolescents transis et exténués qu'il avait fait monter dans sa voiture quelques heures plus tôt …
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C'était une nuit d'automne. Probablement en 1972, à moins que ce ne soit en 1971. Le ciel déversait une pluie froide et drue, impitoyable pour qui ne pouvait se mettre à l'abri. Sur le bord de la 117, quelque part entre Mont-Laurier et le parc La Vérendrye, deux filles et un garçon faisaient le pied de grue, espérant qu'une voiture finirait par passer. Frigorifiés, ils attendaient depuis plus d'une heure. Pour se réchauffer, ils avaient alors décidé de marcher vers le nord. Il leur fallait bouger pour oublier leurs vêtements trempés, leurs doigts gourds et les crampes douloureuses de leur estomac affamé.

Le jeune homme, mince mais robuste, portait les sacs les plus lourds sans se plaindre. Ses cheveux blonds, portés longs, avaient confondu la plupart des automobilistes qui s'étaient arrêtés pour prendre les trois amis en stop quelques jours auparavant, alors qu'ils se dirigeaient vers le sud. Vers la grande ville. Vers Montréal.

Mais cette nuit-là, aucun véhicule n'était en vue, comme si le temps était suspendu. Quelle heure pouvait-il être? Dans un état second les trois amis mettaient un pied devant l'autre. Ils avaient bien été tentés de rester au village précédent, sous les lampadaires qui diffusaient une lumière rassurante. Mais ils craignaient qu'un éventuel conducteur n'hésite à s'arrêter s'il croyait que les jeunes gens habitaient le coin. Ils crurent qu'ils susciteraient d'avantage l'empathie s'ils étaient aperçus au milieu de nulle part…

Le ciel bouché masquait la lune et les étoiles; la nuit était noire, comme la route 117, comme tout ce qui les entourait. Seule la ligne blanche et le bitume qu'ils sentaient sous leurs espadrilles détrempées, leur indiquaient le chemin. La fatigue se faisait sentir mais ils n'osaient s'arrêter. Encore quelques pas pour ne pas penser au froid, à la faim ni à l'épuisement qu'ils ressentaient depuis que le dernier automobiliste les avait fait descendre au bout de sa destination, loin derrière.

De quoi pouvaient-ils discuter en avançant côte à côte dans l'obscurité? De leur projet qui avait échoué? De ce que l'avenir leur réservait? Des amis qui les attendaient et qui avaient envié leur audace? Des études qu'il leur faudrait reprendre? Du retour au bercail où il leur faudrait affronter les foudres et les semonces de leurs parents? Peut-être crânaient-ils? Peut-être aussi avaient-ils peur de cet inconnu qu'était l'avenir?

Ils n'auraient su dire qui, le premier, avait vu la lumière des phares trouant la nuit. Cela prit un certain temps à leur esprit confus pour réaliser qu'une voiture se dirigeait vers eux, roulant vers le nord. Remercièrent-ils le ciel? Personne ne s'en souviendra… C'est Joan la plus hardie des filles qui, sans réfléchir, se jeta pour ainsi dire devant le véhicule qui fonçait vers eux. "–Il n'aura pas le choix de s'arrêter!" Eut-elle le temps de crier à ses amis avant de s'élancer au centre de la chaussée en agitant les bras et sautant sur place.

Le jeune homme laissa tomber les sacs qu'il transportait et couru vers sa copine téméraire qu'il agrippa par le bras avant de la tirer sur le bas-côté de la route. Déchirant la nuit, le crissement des pneus fit écho à la catastrophe évitée de peu. L'adolescente se dégagea brusquement et se rua sur la portière qu'elle ouvrit sans hésiter. Derrière elle, le garçon et l'autre jeune fille, encore sous le choc, avaient peine à réaliser ce qui venait de se produire.

La discussion fut brève et Joan fit signe à ses amis de venir la rejoindre. Les adolescents s'engouffrèrent dans une voiture imposante et durent s'entasser tous trois aux côtés du conducteur, puisque sur la banquette arrière déjà encombrée, il y avait à peine assez d'espace pour déposer leurs maigres bagages.

Ils furent soulagés d'apprendre qu'ils pourraient faire le trajet jusqu'à Val d'Or. Les jeunes gens exténués fermèrent bientôt les paupières, se sentant étrangement en confiance auprès de cet inconnu qui, silencieux, gardait les yeux rivés sur la route. L'autre jeune fille se souvint, longtemps après, que l'homme avait fait une halte au Domaine. Il leur avait offert à chacun un café bien chaud, ajoutant que c'était tout ce qu'il pouvait faire pour les aider à se réchauffer.

L'aube naquit, embrasant le ciel boréal, sans qu'aucun des adolescents ne puisse contempler le soleil qui se levait. Ils avaient sombré dans un sommeil profond, balancés par le tangage de la grosse voiture qui filait sur la route. Soudain, le véhicule stoppa. "-C'est ici que vous descendez." Leur dit l'homme. "-Je ne veux pas risquer d'être vu avec vous à bord…" ajouta t-il. Les trois amis se frottèrent les yeux en regardant autour d'eux. La voiture s'était arrêtée dans une petite rue déserte à l'entrée de Val d'Or.

Ce n'est qu'à cet instant que les adolescents prirent conscience que quelque chose clochait. Un truc qu'ils n'avaient pas remarqué lorsqu'ils étaient montés; à cause de leur fatigue, à cause de la pénombre qui y régnait. A l'arrière de l'automobile, par l'interstice d'un rideau entrouvert, ils aperçurent un assemblage de bois sombre, reconnaissable entre tous. Juste à côté, une forme longue et étroite disparaissait sous une toile blanche…

Lentement, l'homme souleva le drap. Un léger sourire étira ses lèvres lorsqu'il vit l'effroi dans les yeux des trois adolescents qu'il avait fait monter dans sa voiture quelques heures plus tôt … Un pied apparut, d'une blancheur cadavérique; un carton, accroché à un des orteils du macchabée, oscillait sous la brise légère qui entrait par la portière ouverte.
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J'avais 14 ou 15 ans. Jamais je n'oublierai cette nuit où, transie et exténuée, je montai dans une voiture avec mes amis Joane (surnommée Gougoune) et Ubald. Cette "grosse familiale" qui roulait à tombeau ouvert en direction de l'Abitibi, était en réalité un corbillard.

Le conducteur avait dû se rendre à Montréal pour récupérer deux corps qu'il rapportait à Val d'Or. L'un était dans un cercueil et l'autre, sur une civière. Cela expliqua sans doute le silence de mort qui régna à bord … Nous restâmes discrets sur l'identité de l'employé des pompes funèbres qui nous avait pris en stop malgré l'interdiction. Nous ne voulions en aucun cas signer son arrêt de mort; il pouvait dormir tranquille… nous fûmes muets comme des tombes…

mercredi 29 octobre 2008

Mon vœu…


Ça y est; ils sont tombés. Les premiers flocons sont arrivés. Oh, pas assez pour qu'ils enjolivent vraiment le paysage. Enfin, pas sur mon village. Ici les précipitations se mesurent encore en millimètres.

J'aime les premières manifestations de l'hiver. Quelle féerie de voir se transformer les montagnes ternes en panoramas dignes des plus belles cartes de Noël! La magie des flocons, alors qu'ils tombent à plein ciel, énormes et légers comme du duvet. Et les arbres, lorsqu'ils se parent de lourdes étoles d'hermine qui font ployer leurs branches. Chaque plante, piquet de clôture et banc de parc, voit ses formes poétisées, ses contours magnifiés sous l'épaisse parure scintillante.

Dans deux jours, un poste de radio de Burlington commencera à diffuser des chants de Noël. Et moi, je raffole de cette musique! J'ai toujours aimé l'ambiance des Fêtes, l'esprit de Noël. Enfant, c'était pour les cadeaux et surtout pour revoir mes grands frères et ma grande sœur qui revenaient à la maison pour quelques jours (avec des cadeaux pour moi, bien sûr!).

Avec le temps, cela s'est transformé. Évidemment, les présents n'y sont plus pour rien et il est rarissime que je vois ma fratrie durant cette période, à part Frérot puisque j'ai l'habitude d'aller passer Noël en Abitibi. Chaque année cependant je rêve d'un peu de magie, comme d'assister à la messe de minuit à l'église de mon village natal. Pourtant je ne le fais pas. Pourquoi? A cause de la dizaine de kilomètres de route enneigée, du froid de canard, de Maman qui se couche tôt, des enfants pour qui, assister à une messe, ne ferait que retarder le moment tant attendu d'ouvrir leurs cadeaux. Et probablement beaucoup par paresse. Alors j'ai l'impression que Noël a perdu de son essence et que son esprit ne survit que dans mon âme et dans mon cœur.

J'ai donc écrit au Père Noël plus tôt cette année. Et j'ai demandé gros; bien sûr j'ai craint que mon souhait ne puisse être exaucé. Que ce serait trop extravagant et surtout, "pas raisonnable". Mais après tout, qu'avais-je à perdre?

C'est cet après-midi que je reçus la réponse. Je pataugeais dans la paperasse et la comptabilité depuis le matin, payant des factures, commandant de nouveaux chèques et jouant au ping-pong avec les différents services d'une caisse dite populaire lorsque j'entendis un son étrange. Dideliiiiiignnnnnnnnn… Je relevai la tête et vis des milliers d'étoiles qui étincelaient sur l'écran de mon ordinateur! J'en aperçu même une qui filait à toute vitesse. Instinctivement, je fis un vœu… Et Dideliiiiiignnnnnnnnn… une fée apparut!

C'est avec un sourire vraiment gentil qu'elle m'apprit que mon souhait m'était accordé! Là je devine chez-vous un certain scepticisme. "–Comment ça, une fée? Et le Père Noël dans tout ça?" Je sais; c'est exactement la réflexion que je me suis faite. Mais bon…

Elle m'a alors expliqué que le Père Noël, soucieux d'améliorer son service, avait nommé des collaborateurs pour le seconder. Et que c'était elle qui avait hérité des cas spéciaux, des requêtes délicates et "pas raisonnables". Wow… Drôlement efficace quand même…

Ouf, imaginez toute la discipline et la retenue qu'il me fallut déployer pour continuer à régler les comptes et faire imprimer les rapports dont aura besoin le comptable demain au lieu de célébrer cette grande nouvelle en… je ne sais pas moi, en commençant à me faire une liste pour ne rien oublier? ou encore à rédiger tout de suite mes cartes de souhaits pour les Fêtes?

Oui, ce sera formidable et à la fois étrange. Bon, d'accord, je ne vous fais pas languir d'avantage. Cette année, je passerai Noël sur une jolie petite île baignée par l'océan Atlantique. Ce sera ma seconde visite à Saint-Pierre et Miquelon. Outre ses rues qui descendent vers le port, ses maisons colorées et ses montagnes qui surplombent la ville, il me tarde de revoir la silhouette de l'Île aux marins qui me fait tant rêver. Tout comme un insulaire qu'il sera doux de retrouver…

mardi 28 octobre 2008

Bouquinomanie…


Après avoir retourné à la bibliothèque le premier tome de Lili Klondike joliment écrit par l'auteure originaire de Sherbrooke, Mylène Gilbert-Dumas, je suis revenue chez-moi avec un autre bouquin. Je ne connaissais pas l'auteur, n'avais lu aucune critique du roman, ni aperçu le titre dans les librairies que je tente d'ailleurs de ne pas trop fréquenter.

Pourquoi j'ai choisi ce livre plutôt qu'un autre? A cause d'un mot sur lequel mes yeux ont trébuché. Quatre syllabes ensorcelantes. Treize lettres qui, lorsqu'elles se suivent, forment un adjectif au pouvoir incontestable… Ce mot? Machiavélique.

L'histoire est celle d'un homme; un américain. Il se retrouve à Paris, en cavale. Que fuit-il? Sa vie conjugale qui a éclaté et son boulot de professeur qu'il a perdu. Pourquoi Paris? Parce qu'il rêve d'écrire un roman.

Au fil des pages, on lève le voile sur les problèmes qu'a connus notre héros, Harry Ricks, et on comprend mieux pourquoi il s'est taillé. Par habitude, on tente d'anticiper ce qui arrivera au personnage; on émet des hypothèses. Rien de ce qu'on a pensé ne se produit. Puis le rythme s'accélère; il se passe des trucs moches. On ressent de l'empathie pour ce pauvre Harry qui ne l'a pas facile. On se perd en conjectures et on tente de trouver la clé d'une multitude d'énigmes pour le moins ... énigmatiques. Peine perdue…

Soudain, tout devient bizarre mais probable. Les embrouilles se multiplient, en demeurant plausibles. On n'a qu'une envie… poursuivre la lecture, coûte que coûte. Malgré la vaisselle qui s'accumule, la paperasse qu'il faut préparer pour le comptable qui viendra jeudi et l'horloge qui ne cesse d'indiquer qu'il est temps d'aller au lit…

Il me reste 59 pages à lire. Et je n'ai aucune idée du dénouement. Mon cerveau échafaude des hypothèses sur le comment du pourquoi et… à chaque page qui se tourne, mes théories s'écroulent, se dégonflent et me laissent ahurie, médusée, confondue-due-due. Après avoir lu les 319 premières pages, je n'ai qu'un mot à ajouter, un seul: ENCORE!

Le titre?
La femme du Ve. L'auteur? Douglas Kennedy.

PS: Ok, j'ai un peu exagéré, je l'avoue. Oui, j'ai terminé toutes les réparations de vêtements que m'avait confiées l'amie Céline. Et, oui j'ai vidé de son contenu le vestibule en vue des travaux d'isolation qui débuteront demain matin. La vaisselle? Euh, ça? En fait, j'avais prévu la laver mais pas ce soir. Pourquoi? Pour 59 excellentes raisons…

dimanche 26 octobre 2008

Les beaux dimanches …


C'était le titre d'une émission de télévision que mes parents regardaient, il y a longtemps, lorsque j'habitais encore sur la ferme familiale. Je n'avais qu'à entendre le thème musical, pour être submergée d'ennui. Non pas que le contenu était inintéressant, mais plutôt parce que c'était le dimanche soir. Sa musique sonnait la fin du week-end qui avait passé trop vite et annonçait le début d'une autre semaine d'école.

Sur la ferme, le dimanche était un jour comme les autres. Pas de repas spécial, aucun visiteur, ni de sortie. En ce temps là, lorsqu'on cultivait la terre et qu'on élevait du bétail, les jours fériés n'existaient que sur le calendrier.

Depuis que je suis travailleur-autonome, je fais le même constat: mes semaines ressemblent aux week-ends. Samedi, mardi ou vendredi? Il m'arrive de ne plus savoir quel jour on est. Ma famille et mes amis étant trop loin pour me le rappeler, mes dimanches ne font pas exception.

Vous voulez savoir ce que j'ai fait aujourd'hui? J'ai reçu une cliente. Elle est venue faire le second essayage de sa tenue de mariée. J'avoue que j'avais naïvement espéré que tout allait être parfait et qu'après avoir enfilé sa robe, je n'aurais eu qu'à applaudir l'ourlet juste de la bonne longueur et la tombée impeccable du tissu.

Bon… la tunique du dessous devait être raccourcie d'environ deux centimètres; pas de quoi fouetter un chat. Mais il en était autrement du surcot (la robe du dessus). Les pièces du milieu, au devant, se croisaient à l'ourlet et celle de droite tournait légèrement vers l'intérieur.

Vous ne pourriez imaginer à quel point je n'avais pas envie de voir cette robe accrochée dans mon atelier une semaine de plus. Alors j'ai suggéré à ma cliente et à son tourtereau, d'aller casser la croute au Pilsen. Ça tombait bien, ils avaient faim et n'avaient jamais visité le village. J'avais besoin de deux heures pour faire les corrections. Aussi, dès qu'ils refermèrent la porte, je saisi le découseur et me mis au travail avec frénésie.

Lorsque les futurs épousés revinrent, exactement cent vingt minutes plus tard, je me croisai les doigts très très fort, et … Ouf! Parfait! Le vêtement tombait exactement comme il le devait, les centres du surcot étaient parallèles et espacés juste ce qu'il fallait pour qu'on voie la tunique de satin du dessous, laquelle était maintenant de la bonne longueur. Après avoir dit aurevoir aux amoureux et adieu à la robe de mariée, je ressentis un urgent besoin d'aller prendre l'air.

Le soleil était encore chaud et l'air embaumait l'automne. Je marchai lentement dans les rues, admirant les vieilles maisons et les autres qui ont poussé tout autour. Puis je revins sur mes pas pour me diriger vers le parc. Comme il était étrange de m'y promener seule. Pixel ne l'accompagnait pas, songerez-vous? Non… le chihuahua fait un séjour dans un foyer tout près d'ici. Voilà maintenant une semaine qu'il est parti. Je saurai bientôt si l'adaptation se passe bien; selon les dernières nouvelles, il semble que oui. C'est ce que je voulais: trouver un maître qui aurait du temps à consacrer à ce petit chien affectueux et possessif. Mais depuis quelques jours, je l'avoue, sa présence me manque. Je me ferai à cette séparation et me répète que c'est mieux ainsi.

Il y aura de plus beaux dimanches …

vendredi 24 octobre 2008

Hors jeu …


Nuit blanche, nausées, mal de tête, frissons et sensation d'être un contenant sans contenu…

Euh, bon … hein? Ah oui… il n'y aura pas de billet aujourd'hui.

Je déclare for-Fée…

mercredi 22 octobre 2008

Se retrousser les manches …


Samedi dernier, en revenant de la bibliothèque municipale où j'avais emprunté deux bouquins dont l'excellent "Lili Klondike" écrit par la plus que talentueuse Mylène Gilbert-Dumas, je m'arrêtai à l'atelier de mon amie Céline.

C'est toujours agréable de nous retrouver devant un café. Nous parlons littérature, travail, projets et il nous arrive aussi de refaire le monde. Cette fois-là pourtant, nous n'avons pas prolongé notre entretien plus qu'il ne le fallait. Le boulot nous attendait. Moi, c'était la finition de la robe de mariée de Sonia T. qui était venue en faire l'essayage il y a quelque temps. Céline, quant à elle, avait une multitude de réparations, certaines simples et d'autres compliquées, qu'il lui fallait livrer au cours de la prochaine semaine. Entre autres, elle me disait avoir quatre vestons qui lui "pesaient"; toutes des manches à raccourcir ou des épaules à rétrécir.

Outre les fermetures Eclair sur les pantalons ou les manteaux, les manches de veston sont parmi les réparations les plus longues à faire et les moins faciles. Mais moi, j'aime lorsque c'est un peu plus difficile, lorsque qu'il faut utiliser son système "D" et faire preuve d'ingéniosité. Car la clientèle qui désire faire modifier ou réparer ses vêtements veut que ce soit impeccable et surtout, surtout, que ça ne coûte pas cher…

Je suis donc revenue chez-moi avec les fameux vestons et c'est ce matin que je me suis mise à la tâche. Cela devait bien faire 15 ans que je n'avais pas fait des modifications ou des ajustements sur des vêtements que je n'avais pas moi-même conçus; par conséquent, je décidai de commencer par les moins compliqués, histoire de me réchauffer en prévision de ceux qui me donneraient du fil à retordre.

Hum… il faut se méfier de ce qui nous semble à première vue évident! La seconde veste à laquelle je m'attaquai fut celle qui fut la plus complexe, qui me prit le plus de temps et qui me fit m'interroger de très longues minutes (les cogitations ne sont pas facturables…). Vous avez déjà remarqué comment est fait l'ourlet d'une manche de veston pour homme? Non? Ça vaut la peine que vous regardiez ça de plus près… Pour ma part, je n'avais jamais eu à en raccourcir de ce genre là. Ma perplexité atteignit un sommet lorsque j'eus décousu et séparé la doublure du tissu principal. J'aurais eu besoin d'un café bien fort et de 2-3 gélules de Ginkgo Biloba mais je n'osais interrompre le travail de mon cerveau qui faisait des plans, les défaisait, élaborait une nouvelle stratégie pour aussitôt la rejeter. Finalement, il me fallut 80 longues mais Fée-briles minutes, pour que les manches soient raccourcies de 4 cm, recousues, dont une partie à la main, repassées et que les boutons qu'il m'avait fallu retirer, aient repris leur place. Le résultat? Bien, très bien même!

Fière de mon exploit, il ne me restait plus qu'à me retrousser les manches pour les deux dernières vestes qui, elles aussi, révélèrent de truculentes complexités…

C'est Céline qui sera soulagée demain; elle avait promis à sa cliente que les vestons seraient prêts vendredi matin!




"Vous ne sauriez croire avec quelle facilité l'impossible se fait dès qu'il est nécessaire."
Anatole France (1844 – 1924)

lundi 20 octobre 2008

Je couds, vous coudrez, ils découdront…


Que de fois n'aie-je entendu "je n'ai aucun talent en couture" ou "comme j'aimerais savoir coudre". Vous savez, la couture n'est pas un talent mais une technique, rien d'autre. Évidemment on peut être doué pour apprendre rapidement ou non, et aimer le travail bien fait ou se contenter de quelque chose de bâclé. Mais je vous le promets, la couture ça s'apprend et non, ce n'est pas compliqué.

Récemment je décidais d'offrir des cours de couture privés et semi-privés. Pas de sempiternel projet "jupe-pantalon-chemisier", ni rien d'imposé d'ailleurs. Même pas de durée préétablie. Ce seront des cours individualisés où on viendra acquérir des techniques, se perfectionner, obtenir de l'aide pour un projet spécifique ou simplement pour le plaisir d'apprendre à réaliser de jolies choses.

Ce que j'ai envie de partager, ce sont les techniques simples, les trucs surtout. Ceux qu'on ne nous apprend pas à l'école. Ceux que m'ont enseignés mes excellentes couturières et les autres, que j'ai développés au fil des ans.

Certains désireront apprendre à raccourcir des pantalons ou des jupes, remplacer une fermeture éclair et même coudre des boutons. D'autres voudront créer des costumes d'Halloween pour leurs bambins ou leur confectionner des vêtements. Sûrement qu'il y aura des demandes pour apprendre à fabriquer des rideaux, des housses de couette, des robes de chambre ou des jouets. Et des braves tiendront mordicus à réaliser des "jupes-pantalons-chemisiers".

Peu importe le projet: une fois que l'on a appris comment utiliser une machine à coudre, à choisir le bon tissu, à le tailler correctement, les trucs pour faciliter l'assemblage des pièces, pour faire de jolies coutures régulières et des coins bien carrés… Qu'on comprendra le jeu des mains pour guider le tissu lorsqu'on le coud, ce qu'est un droit fil et ce qui arrive si on ne le respecte pas et qu'on saura que la vapeur peut faire des miracles, hé bien, il ne restera qu'à mettre le tout en pratique.

Simpliste? Non, simple. Parce que, comme dans toute chose, c'est en forgeant qu'on devient forgeron et en sciant que Léonard devint scie (celle-là, c'est l'ami Taximan
qui me l'a apprise :O).

Pour se débrouiller en couture, il y a trois règles à retenir:

-Observation: on apprend énormément en regardant "comment c'est fait". En observant les vêtements qu'on a achetés ou lorsqu'on se promène dans les magasins, il est intéressant de vérifier quelles techniques ont été utilisées pour les assembler ou encore comment on s'y est pris pour coudre une manche ou un col particulier.

-Précision: lorsque j'étudiais en mode, j'avais été surprise de voir sur mes travaux, que le professeur avait rectifié une valeur de couture de … 1 millimètre! Tiré par les cheveux? Non. Plus on est exact en dessinant un patron, en découpant le tissu, en respectant la valeur de couture au montage, plus on obtient un résultat précis.

-Persévérance: il faut parfois un certain temps pour en arriver à un beau produit. Au besoin, il faudra découdre et recommencer. Parfois même de re-découdre et re-recommencer. Mais la satisfaction du travail bien fait vaut amplement le temps passé à le peaufiner.

Noël n'est pas si loin et plusieurs auront envie de confectionner des présents pour les leurs. Qui sait… peut-être serez-vous celui ou celle qui recevra pour Noël une magnifique réalisation "fait main"?

PS: N'hésitez pas à me contacter pour obtenir plus d'information sur les cours ou pour connaître les places disponibles…

samedi 18 octobre 2008

Soleil d'octobre ...


C'était un vendredi ensoleillé. L'automne était exceptionnellement doux et donnait un répit aux abitibiens habitués à des températures plus fraîches en ce mois d'octobre.

Une jeune femme était allongée dans le salon de la maison de son père. Elle avait le visage en sueur, ses longs cheveux bruns et bouclés lui collaient aux tempes et on pouvait voir dans ses grands yeux noisette, l'inquiétude qui l'habitait. Sa mère était à ses côtés et la réconfortait du mieux qu'elle pouvait. Son père, quant à lui, faisait les cents pas dans la pièce et la douceur de son visage contrastait avec son masque sévère coutumier. Le docteur Dion avait été appelé au chevet de la jeune femme; ce n'était pas la première fois qu'il se rendait dans cette solide maison à quelques milles d'Amos. Il y était venu quelques mois plus tôt pour un cas semblable.

La maison était calme; les enfants avaient été expédiés chez leurs grands parents et les plus âgés s'étaient vus assigner des tâches qui allaient les tenir occupés jusqu'au souper.

Dehors, un jeune homme de 23 ans attendait, étendu sur l'herbe. On lui avait gentiment suggéré d'aller prendre l'air car son anxiété ne faisait qu'ajouter à celle de sa compagne dont les cris parvenaient jusqu'à lui. Que pouvait-il faire d'autre que de se ronger les sangs et se sentir impuissant?

Au milieu de l'après-midi, sous un soleil d'automne resplendissant, un long cri se fit entendre, différent des autres. Le jeune homme sauta sur ses pieds et s'élança vers la maison. Ému, il s'approcha lentement de la jeune femme dont il était follement amoureux; il l'avait fait sienne devant Dieu et devant les hommes l'année précédente. Ils avaient d'ailleurs souligné leur 1er anniversaire de mariage quelques jours plus tôt. Épuisée mais rayonnante, elle murmura: "-C'est un garçon…". Le jeune époux s'avança timidement vers sa belle-mère qui lavait avec des gestes tendres une petite chose toute rouge et fripée.

C'est ainsi qu'en ce beau vendredi d'automne, le 18 octobre 1946, naissait mon grand frère, premier enfant de mes parents. Ma mère tenait à lui donner un prénom peu commun; elle choisit celui de Gilbert. D'origine germanique, il signifie "brillant". Elle ne pouvait mieux choisir…

Cher Grand Frère, je te souhaite une merveilleuse journée d'anniversaire. Malgré la distance, malgré parfois des silences, sache que je pense à toi très souvent et que je t'aime GROS comme ça…

Ta soeurette.

jeudi 16 octobre 2008

Tête de gé-linotte…


Au début de la vingtaine, Frérot travailla à quelques reprises en forêt; sa tâche consistait à faire du débroussaillage. Il lui arriva de partir de longues semaines pendant lesquelles il dû dormir sous la tente, au milieu du bois. La plupart du temps des amis à lui étaient ses coéquipiers. Peu d'hommes auraient accepté un travail dans de telles conditions; cela laissait la place aux jeunes un peu marginaux, catégorie dont faisait partie mon petit frère à cette époque.

C'est ainsi que Frérot se retrouva, un automne, à plusieurs kilomètres au nord de Matagami à "faire de la ligne", terme utilisé pour désigner le travail de coupage de branches. Son ami C. faisait équipe avec lui.

Un soir, le boulot terminé, ils étaient assis tous deux devant le feu de camp qu'ils avaient allumé et s'apprêtaient à engloutir leur souper qui consistait, comme les jours précédents, en une tranche de Klic-Kam entre deux, de pain blanc, badigeonnées de moutarde. C'est alors qu'ils aperçurent non loin d'eux une gélinotte huppée, communément appelée "perdrix". L'instinct de chasseur de nos deux coupeurs de ligne refit surface instantanément! C. attrapa un gros caillou qui bordait le feu et le lança en direction du volatile qui le reçu en pleine tête, s'effondrant sans même avoir le temps de cacaber, de glousser ni de pirouitter!

Les deux comparses salivaient déjà en imaginant ce Bonasa umbellus empalé sur une branche au dessus des braises. Ils arrivaient presque à sentir le parfum de sa chair juteuse sous la peau rôtie et craquelante…

Frérot saisit le lagopède inerte par les pattes et le déposa dans la tente puis retourna rejoindre son ami qui, semble t-il, n'était pas peu fier de son exploit! Abattre une perdrix avec une pierre! Ils se promirent que le souper du lendemain serait un véritable festin…

Plus tard en soirée, pendant que C. éteignait le feu pour la nuit, Frérot regagna la tente et y alluma une petite lampe de camping. Ils s'apprêtaient à se glisser dans leur sac de couchage lorsqu'ils virent bouger la perdrix. Elle n'était pas morte mais seulement assommée!

"-Tords-lui le cou!" s'écria C. qui soudainement avait perdu de sa superbe… "-Euh, tords-lui le cou toi-même…" lui répondit Frérot, "… c'est ta perdrix!". Nos braves chasseurs ne pouvaient se résoudre à tenter une seconde fois de trucider la gélinotte huppée qui titubait dans la tente. Pas question non plus de la relâcher dans la nature car la pauvre bestiole avait la tête écorchée à l'endroit où l'avait atteint le projectile!

Contrit, C. ouvrit la trousse de premiers soins pendant que Frérot attrapait la perdrix qui, encore étourdie, ne lui offrit aucune résistance. Quelques minutes plus tard ils allèrent déposer le gallinacé, qui commençait à gigoter, sous les branches basses d'un gros sapin qui poussait non loin de leur campement.

Cette nuit là, nos deux compères eurent du mal à s'endormir tant ils riaient! Ils imaginaient la tête que ferait un éventuel chasseur découvrant sa proie, l'arrière de la tête badigeonné de teinture d'iode et recouvert d'un diachylon!

mardi 14 octobre 2008

Lune d'octobre ...


Chaque jour, sans exception, j'amène Pixel au parc de la rivière. Même s'il commence à me tourner autour dès 16h00, oreilles dressées et yeux remplis d'espoir, ce n'est que vers 17h00 que je donne le signal du départ en lui mettant son collier.

Je fais parfois exception; si le ciel est menaçant, je devance notre sortie. Il m'est aussi arrivé, durant l'été, d'y aller sous la pluie, chose qui ne sembla pas trop déranger mon chien tant il aime ces balades quotidiennes. Aujourd'hui toutefois, ce n'est qu'une fois le soir tombé que je me suis décidée à fermer l'atelier pour faire cesser les trépignements de mon compagnon à quatre pattes.

Juste avant d'arriver au parc, c'est une lune pleine et lumineuse qui nous accueillit. Espiègle, elle disparaissait derrière les nuages qui envahissaient le ciel à l'est, puis resurgissait, éblouissante et fascinante.

Un vent tiède ébouriffait la cime des arbres, faisant bruire leurs feuilles. L'automne exhalait son parfum, mélange d'herbe mouillée, de terre et de végétaux en décomposition. Sur le ruban sombre de la rivière, la lune s'amusait à dessiner le contour des vaguelettes. A l'extrémité nord du parc, aucune lumière ne venait pâlir la scène, me laissant dans cette obscurité veloutée que seul l'astre lunaire perçait par à-coups.

Des soirs comme celui-là, je ne peux m'empêcher d'imaginer comme il serait doux de déambuler, ma main emprisonnée dans une autre, chaude et caressante. De partager mon émerveillement pour cette grosse sphère lumineuse et de découvrir, émue, que nous sommes deux à contempler la même étoile à l'horizon.

"La rêverie est le clair de lune de la pensée. "
Jules Renard
"Dans l'océan du ciel,
Sur les vagues de nuages,
Le vaisseau de la lune
Semble voguer
Parmi une forêt d'étoiles."
Kakinomoto no Hitomaro

"…voyage si tu prétends à quelques valeurs; ce n'est qu'en parcourant les
cieux que le croissant devient pleine lune..."
Proverbe arabe

lundi 13 octobre 2008

Retour vers le passé…


Samedi je n'ai pu me défiler; il me fallait vraiment revisiter mon passé. Oh, ce n'est pas que j'en avais envie! D'autant plus que je savais que ce serait ardu. Au début j'avais naïvement cru qu'un jour suffirait, mais je l'avoue, après quelques heures je ne savais plus trop où j'en étais et je dus m'arrêter. Par conséquent je me vis contrainte de m'y remettre dimanche, puis aujourd'hui. J'eus des moments de découragement mais une fois le processus commencé, je ne pouvais plus reculer…

Si
Nicolas Boileau, un jour de 1674 déclara: "Vingt fois sur le métier, remettez votre ouvrage.", moi aujourd'hui je proclame: Vingt fois dans l'atelier, réorganiser devient inévitable…

Encore? Penseront mes amis! Eh oui, il me faut encore une fois réaménager mon espace de travail! A l'été, ce fut pour faire place aux nombreux rouleaux de tissus rapportés de chez mon sous-traitant. Cette fois-ci, ma réorganisation vise à caser deux tables, idéalement trois, sur lesquelles mes futures étudiantes en couture pourront travailler. En effet, faute de recevoir des commandes suffisantes de mes clients en mode, j'ai décidé d'offrir des cours de couture privés et semi-privés pour débutants(es).

Le réaménagement consista entre autres, à déplacer les boites de ce qui reste des vêtements de mon ancienne boutique. Une fois bien à l'abri dans de grands sacs en plastique transparent, ils prirent le chemin de la cave où je les remis dans leur boite respective bien identifiée. Puis ce fut le tour des cartons de garnitures peu utilisées. Comme certaines boites étaient trop lourdes, je dus répartir le contenu dans de plus petites que je glissai à leur tour dans de grands sacs qui les préserveront de la poussière et de l'humidité. Quoique long, cette étape ne me rebutait pas trop.

Non, ce qui m'horripilait avant même de commencer c'était ces quelques boites avec l'inscription:
A TRIER Et ce n'était pas mon écriture; c'était celle d'Ex. Et ça ne me disait rien qui vaille. Ces fameux cartons avaient été empilés le long d'un mur dans mon atelier en décembre 2006 et n'avaient jamais été ouverts. Je pouvais m'attendre à tout… Bien sûr, j'aurais pu tout aussi bien les descendre à la cave tels quels, mais cela n'aurait que remis à plus tard cette corvée. Ainsi je décidai de vérifier le contenu et, comme le suggérait l'inscription, de le trier. Ce fut long, très très long…

Tels des
matriochkas, ces cartons recelaient des boites plus petites dans lesquelles je découvris des choses sans importance qui en cachaient d'autres, tout aussi inutiles…

Je découvris: des vieux mémos datés de 2001, une multitude d'affichettes de rabais pour le Boxing Day, la Fête des Mères, la Vente Trottoir. D'autres pour la promotion de l'arrivée en boutique d'une nouvelle collection, pour l'instauration de cartes privilèges, annonçant le changement des heures d'ouverture. Je trouvai aussi de vieux certificats-cadeaux, une liste de clients, des pochettes de plastique remplies d'étiquettes cartonnées pour identifier les vêtements. Dans la même boite, avait été rangée une lampe de poche dont une pile avait coulé à l'intérieur la rendant inutilisable. Je vis des sacs pour la balayeuse à tapis, des chemises de suspension et plusieurs cœurs découpés dans du carton rouge.

Chaque découverte me fit faire un bon dans le passé, remuant un lot de souvenirs, les uns agréables, les autres nettement moins. C'est donc avec une certaine hâte que je remplis un énorme sac qui prit le chemin de mon bac bleu, et un plus petit qui se retrouva aux ordures.

Malgré ces trois jours entrecoupés, il est vrai, d'occupations plus jouissives comme la lecture du
dernier roman de Guillaume Musso, je ne réussis pas à terminer ce qui sera le dernier réaménagement de mon atelier avant très longtemps. Mais je suis confiante: jeudi tout devrait être fin prêt pour recevoir ces élèves à qui il tarde d'apprendre à coudre… sans trop en découdre!

samedi 11 octobre 2008

Fée-erie automnale...

Jour d'automne à North Hatley.
.......




vendredi 10 octobre 2008

Compression littéraire…


Il y a quelques semaines, je présentais à une boite de marketing une courte histoire pour les petits. Elle fut assez bien reçue, sans "wow" mais sans "ouache". C'était un début.

Si j'ai un cœur d'enfant, j'avoue cependant ne rien connaître aux humains âgés de moins de 7 ans. Les chiens et les chats, ça oui mais je ne crois pas que la littérature les intéresse d'une façon ou d'une autre… quoique je me rappelle soudainement que Daphnée, mon labrador, avait littéralement dévoré deux de mes livres de la série Erotica. Une vraie orgie cellulosique!

Pour en revenir à mon histoire destinée aux bambins, on la jugea un peu longue. De plus, on m'apprit que ces jeunes terriens ne sauraient saisir le principe qu'un enfant devient un jour un adulte et, dans certains cas, un papa ou une maman. Vraiment? Pourtant ce n'est pas sorcier! L'hypothèque, les abeilles, les fleurs… même Jules et Pixel ont compris l'idée! Mais bon, si on me l'affirme…

Il me faudra donc couper certaines tranches de vie de mon personnage principal mais rassurez-vous, il n'y verra rien: Il est perpétuellement bourré! Le plus difficile sera la seconde partie où, après de longues années il … ah non, c'est vrai, je ne peux rien divulguer encore…

Promis, je vous dévoilerai tout avant Noël, ici ou
là-bas



mercredi 8 octobre 2008

Le jour de la marmotte…


La vie est un perpétuel recommencement: chaque jour nous posons les mêmes gestes, formulons les mêmes souhaits de bonheur, ressentons les mêmes désirs d'une vie harmonieuse.

Pas surprenant qu'en cours de route il nous arrive parfois d'avoir une impression de "déjà vu". Comme si la vie, taquine, rembobinait le film de notre parcours pour nous le projeter encore et encore. Au montage il y a bien quelques ajouts, de légères modifications, mais la trame reste similaire.

Nous ressentons la même angoisse mêlée de fébrilité pour ce projet tout neuf ou ce nouveau travail. Un changement de cap nous passionne mais nous insécurise. Une nouvelle rencontre nous fait rêver, parfois hésiter. La fin d'une idylle nous broie le cœur ou nous amène à réfléchir sur ce qu'elle aurait pu devenir. Boulots, foyers, passions, ils se succèdent à la fois uniques mais si semblables.

Mon aujourd'hui s'annonçait sensiblement le même que l'autre d'il y a trois semaines: Rendez-vous avec Marie, ma sorcière de coiffeuse, suivi de quelques courses ici et là qui, sans être tout à fait pareilles à celles de l'autre fois, n'étaient pas si différentes.

De retour dans mon village je fis un crochet par le bureau de poste comme d'habitude. Comme la fois précédente, en passant devant l'antiquaire, je m'arrêtai pour saluer Lise, mon ex-coloc qui y travaille. Mes pas me menèrent ensuite à l'atelier de couture de mon amie Céline, l'ange gardien qui s'occupe habituellement de Jules lorsque je m'absente.

De coutume, nous prenons le temps de monter à l'étage de la boutique Passerose qui abrite un sympathique café pour déguster, elle une tisane aux fruits et moi un thé English Breakfast. Pas aujourd'hui. Dès que je mis les pieds dans son petit local attenant à la boutique, elle me demanda si j'avais envie de lui prêter main forte. L'automne lui apportait beaucoup plus de travail qu'en temps normal et elle avait à confectionner, avant samedi, une dizaine de coussins pour chaise. "Débordée" fut le terme qu'elle employa.

C'est ainsi que je passai une partie de mon après-midi à assembler des rectangles de tissu que Céline avait déjà taillés. J'y retournerai demain et, une fois les coussins terminés, je l'aiderai à venir à bout des nombreuses réparations qui s'ajoutent jour après jour.

Bref, ma journée fut semblable aux précédentes sans toutefois être vraiment pareille. Car aujourd'hui j'ai fait une rencontre; ma première du genre. Elle a bien failli mal tourner comme il arrive parfois. Mais la fin est jolie, vous l'aimerez…

Sur la route qui me ramenait dans mon village, j'aperçus une petite bête qui se dirigeait lentement vers la ligne jaune au centre de la chaussée. Deux automobiles me suivaient. Malgré mes coups de klaxon, la bestiole hésitante restait en plein dans la trajectoire de mes roues. Après avoir ralenti, je réussis à la contourner et à stationner ma voiture sur le bas-côté. Dès le moteur éteint, je me jetai hors de mon véhicule et allai me placer devant la petite chose téméraire pour l'empêcher d'aller plus loin, en tentant de la repousser avec mes pieds.

Les conducteurs des voitures derrière moi eurent la gentillesse d'attendre que j'aie immobilisé ma protégée avant de passer. Sauf qu'en sens inverse, un peu plus loin, je venais d'apercevoir un camion-remorque qui arrivait à vive allure. Le petit animal était apeuré et devait bien se demander ce que je lui voulais! Je réussis tant bien que mal à le faire reculer jusque sur le bord de la route. Lorsque je constatai que le fond du fossé était recouvert d'herbe et qu'il était sec, je n'hésitai pas et je fis dégringoler la boule de fourrure jusqu'en bas. Au même moment, le camion passa en vrombissant.

Émue malgré tout, il ne me resta plus qu'à souhaiter que la petite marmotte n'ait pas l'idée de remonter et de traverser la route. Ce n'est pas tous les jours qu'elle aura une bonne Fée pour veiller sur elle…

dimanche 5 octobre 2008

Plus de peur …


Mon Jules était un chat d'intérieur jusqu'à ce qu'il échappe à la surveillance de ma coloc et fasse une fugue en mai dernier, pendant mes vacances à St-Pierre et Miquelon. Il avait alors passé deux semaines dehors pour la première fois de sa vie. Depuis, il miaule à la porte et, lasse de ses jérémiades, j'ai décidé de le laisser aller vagabonder un peu le jour. Toutefois dès qu'il remet les pattes dans la maison en fin d'après-midi, je décrète le couvre-feu. Je serais trop inquiète de le savoir dans la nature, la nuit tombée.

Hier pourtant il n'est pas réapparu à l'heure du souper comme il en a l'habitude. J'eus beau faire le tour du jardin, de celui de ma voisine, secouer la petite boite de gâteries dont le son le fait accourir immanquablement, rien. Pas de chat et il se faisait tard.

Pendant que je cherchais Jules, Pixel mon chihuahua me tournait autour espérant que je me décide à lui mettre son collier pour notre marche quotidienne au parc qui se trouve au bout de la ruelle. La nuit était presque tombée mais ses yeux m'imploraient et sa petite queue tirebouchonnée allait de droite à gauche, mue par l'espoir de cette balade sacrée. Comme il y a des lampadaires le long du stationnement qui jouxte le parc, je décidai que nous irions malgré la noirceur et que j'en profiterais pour chercher Jules.

J'écourtai néanmoins le parcours, évitant les coins sombres où je craignais la rencontre de moufettes et de ratons laveurs qui traînent dans les parages la nuit. De plus, le vent s'était levé et la température avait considérablement chuté. Rendus à l'endroit où se croisent la ruelle et la piste cyclable, nous avons descendu le talus qui donne sur le terrain de la petite maison blanche qui est inhabitée depuis plus de quinze ans.

D'habitude, dès que nous bifurquons dans la ruelle, mon chien se met à courir vers ma maison qui est juste un peu plus loin, ne s'arrêtant qu'une ou deux fois pour s'assurer que je le suis. Mais hier, il stoppa brusquement près de la petite maison délabrée et il se mit à grogner. A quelques reprises, j'avais vu un gros matou gris aux abords de la bâtisse et j'ai craint que Pixel ne lui coure après et qu'il reçoive un coup de griffe. Je le rappelai et c'est à ce moment que j'entendis un miaulement familier. Je reconnus la voix de Jules.

Je pris mon chien dans mes bras pour qu'il n'effraie pas mon chat qui est de nature craintive. Je m'approchai lentement de la maison mais je ne voyais guère que sa silhouette blanche qui se dressait dans le noir de la nuit. J'appelai Jules qui me répondit par un miaulement apeuré; cela semblait venir de la maison. A l'arrière, la pâle lueur provenant de la rue éclaira faiblement la galerie à demi-défoncée. Une bourrasque de vent fit osciller la porte extérieure qui habituellement est fermée. En m'approchant, je vis que la porte intérieure était entrouverte. Jules s'était probablement faufilé dans la maison. Il n'était pas question que j'entre dans cette baraque abandonnée sans y voir clair. Je retournai chez-moi chercher une lampe de poche et je décidai que Pixel m'accompagnerait; il saurait localiser Jules.

Le vent hurlait maintenant et Pixel, moins brave, voulut que je le transporte dans mes bras. Arrivée à la petite maison blanche, je le déposai par terre et je poussai la porte intérieure. Une forte odeur d'humidité me monta au nez. J'éclairai la pièce qui me sembla avoir déjà été un salon. Le plâtre du plafond était tombé par plaques qui jonchaient le sol. Un vieux fauteuil défoncé occupait un angle de la pièce et le plancher était parsemé d'excréments de souris, de boites vides et de vieilles planches. J'appelai Jules en espérant qu'il ne serait pas trop loin. Dehors le vent faisait un beau tapage et je criai le nom de mon chat. Je cru entendre son miaulement et je demandai à Pixel de "chercher Jules". Mon chien s'élança au fond de la pièce et disparut de ma vue.

Je m'avançai lentement, regardant où je mettais les pieds. Je craignais que le plancher vermoulu ne cède sous mes pas mais il me sembla solide. La pièce au fond était la cuisine; les portes d'armoire étaient grande ouvertes et deux vieilles chaises chromées renversées gisaient par terre. L'escalier qui montait à l'étage était à ma gauche. C'est à ce moment que j'entendis aboyer Pixel.

Je criai son nom mais il ne vint pas, se contentant de japper. Misère … je n'avais pas du tout envie de monter. Outre l'état délabré de la maison qui me faisait craindre de me casser le cou, je n'aimais pas trop l'ambiance lugubre qui régnait entre ces murs décrépis et humides.

Je n'avais pas trop le choix et je tâtai du pied la solidité des marches avant de les franchir une à une. Arrivée sur le palier, je balayai l'espace avec ma lampe de poche. J'aperçus Pixel dans la pièce en face. Il se tenait à côté d'un vieux sommier de métal recouvert de lambeaux de tissus grisâtres. Je me penchai et le faisceau de lumière capta deux yeux luisants. Je parlai doucement à Jules pour tenter de le faire sortir de sa cachette.

C'est à ce moment qu'à travers le vent qui hurlait j'entendis la porte d'entrée claquer et que le chien se mit à aboyer furieusement. Mon cœur manqua un battement et je failli tomber à la renverse tant je sursautai. Jules eut aussi peur que moi, me passa entre les jambes et déboula l'escalier. Je tentai de faire taire Pixel en vain. Je descendis les marches et le chien me devança en continuant d'aboyer de plus belle. Le vent qui avait claqué la porte, l'avait ouverte à nouveau et elle balançait au rythme des rafales. J'espérais que Jules ait eu la bonne idée de sortir dehors et qu'il m'attendrait à la maison. Je m'apprêtais à traverser le salon lorsque Pixel s'arrêta net et se remit à japper. Il rebroussa chemin et se rendit au pied de l'escalier. La lumière de ma lampe de poche l'éclaira et ce que je vis ne me rassura pas: il montrait les dents en regardant en haut des marches. Son poil était hérissé et il se mit à gronder en reculant lentement. Soudain, j'entendis des pas au-dessus de ma tête; une marche craqua.

Je hurlai à mon chien de venir me rejoindre; la peur qu'il perçu dans ma voix le fit accourir et je le saisis d'une seule main avant de m'élancer dehors. Je ne pris pas le temps de refermer la porte et je couru vers ma maison sans me retourner. Mon chien se mit tout à coup à gigoter dans mes bras et recommença à grogner et à aboyer comme un fou. J'entendis une branche craquer non loin derrière moi et le bruit de pas dans les feuilles mortes. Je pris littéralement mes jambes à mon cou, traversai mon jardin sans me retourner et franchis la porte de ma maison que je verrouillai à double tour.

Le cœur battant, je montai à l'étage et attrapai le téléphone sans fil au passage. J'approchai d'une fenêtre et en soulevant le rideau, je risquai un coup d'œil dehors. Je ne vis que les arbres malmenés par le vent déchaîné. Je restai immobile de longues minutes, reprenant mon souffle en songeant que je n'avais pas revu Jules.

Après un moment, sans faire de bruit, je descendis l'escalier; Pixel s'était calmé et son silence me confirma qu'aucun intrus n'était dans la maison. Je me dirigeai lentement vers le portique arrière où aucune lumière ne brillait. Un rectangle blanc dépassait sous la porte et attira mon attention. Intriguée, je le ramassai et revins dans la salle à dîner où une lampe était allumée.

Des lettres avaient été tracées maladroitement sur une feuille tachée et j'eus de la difficulté à déchiffrer le message qui disait:

"Quelle idée d'inventer une telle histoire! Les lecteurs de ton blog risquent de ne plus croire à tes Contes de Fée…".


PS: Merci à Crocomickey qui m'a inspirée avec sa fameuse aventure

Note: Cette petite maison blanche existe vraiment et ce soir, en revenant du parc, je regardais ses fenêtres aux rideaux déchirés et j'ai imaginé cette histoire. Bon, j'espère que je ne ferai pas de cauchemar cette nuit…

samedi 4 octobre 2008

@ Lise ...


Je te souhaite un très joyeux anniversaire!
(Difficile de garder un secret sur la blogosphère ...)

vendredi 3 octobre 2008

jeudi 2 octobre 2008

Problème de taille…


J'ai passé la journée entière à l'atelier à travailler à la coupe de la commande de ma cliente du Saguenay. Et j'en aurai encore pour toute la journée demain. "-Wow, ce doit être une grosse commande!", croirez-vous… Même pas! Seulement dix jupes et seize corsages.

Le principal obstacle est la longueur de ma table. Ses 4 panneaux font au total 5.23 mètres. Je sais, ça peut paraître long. Sauf que ça ne l'est pas. Pas du tout même. Il m'aurait fallu 7.5 mètres pour étendre le tissu des corsages en une seule fois, et 5.5 mètres pour les jupes. De plus, comme l'étendeur qui sert à dérouler les rouleaux de tissu prend environ 70 cm et que l'espace restreint de mon atelier ne me permet pas d'accéder librement au dernier panneau de ma table, sa longueur est réduite à 4.53 mètres.

Misère… j'ai dû séparer la coupe des jupes en deux. J'ai étendu la doublure et le tissu pour la moitié des jupes et les ai taillées. Puis j'ai enlevé le (gros et lourd) rouleau de tissu de l'étendeur pour remettre celui de la doublure (la doublure est plus large et plus mince et doit être placée en dessous) et recommencé un étendage pour la dernière moitié. Heureusement que ce modèle de jupe est composé de 6 pièces identiques. J'ai pu ainsi faire un étendage triple (2 pièces de patron X 3 épaisseurs de tissu et 3 de doublure) ce qui m'a permis de réduire le temps de coupe considérablement.

Quant aux corsages, le plan de coupe a été divisé en trois. Demain j'étendrai le tissu pour les grandeurs 5 et 7 ensembles et les taillerai, j'étendrai à nouveau du tissu pour les 3 et 9, les couperai pour finalement étendre le tissu pour les 11 ans. Contrairement au patron de la jupe, celui des corsages est asymétrique et chacune de ses 7 pièces est unique; la coupe en sera beaucoup plus longue.

Bon, cela aurait pu être pire n'est-ce pas? Hé bien ce le fut… Je me suis aperçue que le tissu destiné à ces modèles avait un défaut de tissage. Une ligne est visible juste au milieu, à environ 60 cm du rebord. J'avais acheté plusieurs centaines de mètres de ce fort joli tricot et les derniers rouleaux ont tous la même imperfection. Il m'en restait environ 100 mètres.

Il n'était pas question que je me résigne à "perdre" ce tissu. J'ai donc fait un placement spécial de sorte à ce que les pièces du patron soient de part et d'autre de la ligne. Pour le corsage, les pièces étaient petites ce qui m'a permis de le faire à l'ordinateur. Mais pour les jupes, très amples, je dus faire les corrections à la main, mesurant l'emplacement où le défaut arrivait et les rétrécir à l'ourlet jusqu'à rien vis-à-vis les hanches.

Évidemment cette coupe de vingt-six vêtements aura pris un temps fou et nécessité une bonne dose de patience. Mais j'aurai la satisfaction d'avoir pu utiliser ce tissu qui autrement aurait été une perte, économisé sur la coupe en la faisant moi-même et trouvé une solution à ce "problème de taille".

D'être entêtée peut parfois être utile!